Au Canada, si depuis des années, les gouvernements provinciaux, responsables de santé publique et les groupes antitabac ont exercé de fortes pressions contre la e-cigarette, arguant qu’elles risquaient de provoquer un retour désastreux vers le tabagisme, le discours pourrait bien changer.
LA E-CIGARETTE FORTEMENT IMPLIQUÉE DANS LA BAISSE DU TABAGISME ?
En effet, les dernières statistiques montrent une forte baisse du tabagisme au Canada et certains experts n’hésitent plus à affirmer que l’explication la plus plausible réside dans la popularité de la e-cigarette en dépit du dénigrement constant de celle ci. Pour eux, c’est d’ailleurs une « très bonne nouvelle » car « cela évite la combustion de produits cancérigènes présents dans la fumée du tabac« .
« Je pense que les gens qui gèrent le contrôle du tabac feront la fête, C’est une chute bien plus rapide que prévue », explique Mark Tyndall, directeur exécutif du Centre pour le contrôle des maladies. « Avec l’utilisation croissante des cigarettes électroniques et la diminution du tabagisme, il est tout à fait logique qu’il y ait eu substitution. »
Selon David Sweanor, avocat d’Ottawa et véritable vétéran de la lutte antitabac, qui soutient vigoureusement la e-cigarette « Il s’agit d’une tendance qui, si elle est réelle, est propulsée par les consommateurs et les entrepreneurs.« . Il tient d’ailleurs à rappeler que « Ce n’est pas les gouvernements qui ont encouragé cela … bien au contraire. Les gouvernements ont fait des choses pour l’empêcher. « .
LES EXPERTS N’ONT PAS TOUS LE MÊME AVIS SUR LES RAISONS DE CETTE BAISSE DU TABAGISME
Évidemment, cette explication ne fait pas l’unanimité. D’autres experts font valoir que la diminution du nombre de fumeurs est principalement le fait des hausses d’impôt. Selon eux, si les e-cigarettes jouent un rôle, c’est au mieux un rôle mineur qui par ailleurs met en évidence un débat sur les dispositifs qui continue à diviser le monde de la santé publique.
Pour les partisans de la e-cigarette, les dispositifs sont beaucoup plus sûrs que les cigarettes classiques. Pour leurs détracteurs, celles ci pourraient normaliser de mauvaises habitudes et agir comme une porte d’entrée vers le tabagisme pour les jeunes.
Selon le Canadian Tobacco, Alcohol and Drugs Survey, après une longue tendance à la baisse, la prévalence du tabagisme a éclaté à la fin des années 2000, le taux de fumeurs de plus de 15 ans n’ayant que légèrement diminué, passant de 19% à 17% entre 2005 et 2011. Les résultats récemment publiés montre que ce taux a ensuite chuté à 13% dans les quatre années suivantes au moment ou la e-cigarette à émergée.
D. SWEANOR : « LE SEUL CHANGEMENT SIGNIFICATIF EST L’AVÈNEMENT DE LA E-CIGARETTE«
Selon le sondage fédéral, 3,8 millions de personnes fumaient en 2015, c’est tout de même 400 000 personnes de moins qu’en 2013, a coté de cela on compte 713 000 utilisateurs de cigarette électronique. La plupart de ces vapoteurs sont en réalité des vapofumeurs mais environ 107 000 étaient d’anciens fumeurs.
Pour David Sweanor c’est assez clair « Le seul changement significatif qui aurait pu affecter les taux au cours des quatre dernières années est l’avènement des e-cigarettes. »
« En fait, la tendance canadienne reflète ce qui se passe aux États-Unis, en Grande-Bretagne et dans d’autres pays où la e-cigarette a décollée« , a déclaré Ken Warner, un professeur de santé publique à l’Université du Michigan ajoutant « Il semble qu’il y ait eu une très forte augmentation d’arrêt du tabagisme, et il semble être récent« . Selon lui cette chute des taux est « sans précédent« .
LES DONNÉES RÉCENTES NE PERMETTENT PAS DE DIRE SI LA E-CIGARETTE A JOUE UN RÔLE
Mais certains des principaux acteurs du mouvement anti-tabac au Canada ne sont pas convaincus. Selon Rob Cunningham, analyste de la Société canadienne du cancer, « Les données les plus récentes ne permettent pas de dire si les e-cigarettes ont pu avoir un rôle de premier plan ». Selon lui, « Non seulement la plupart des fumeurs actuels fument toujours, mais les hausses d’impôts ont eu un effet important.« .
« En fait, dans la tranche d’âge où les cigarettes électroniques sont les plus utilisées, le tabagisme est resté au niveau des deux dernières années, il n’a pas chuté » déclare Cunningham. « C’est préoccupant que les progrès parmi les 20-24 ans semble avoir stagné« .
Cynthia Callard, directrice générale des Médecins pour Smoke-free Canada déclare quand à elle que relativement peu de vapoteurs dans l’enquête annoncent la e-cigarette comme ayant eu un impact dans leurs arrêt du tabagisme. Elle annonce d’ailleurs que « Si la vape à fait une différence, cela ne se refléte pas dans cette enquête. »
« Le seul fait de poser la question sur les e-cigarettes signifie que ces résultats n’offrent qu’un aperçu limité en ce qui concerne le rôle que jouent ces dispositifs » a déclaré Pippa Beck, analyste principal des politiques avec la Non-Smokers Rights Association.
Une récente étude américaine à d’ailleurs trouvé que les e-cigarettes ont fait mieux que les thérapies médicamenteuses approuvée pour aider les gens à en finir avec le tabagisme.