Inutile, le paquet neutre, les images trash, les inscriptions affolantes sur les méfaits du tabagisme ? Pas si sûr, selon la science. Une équipe de chercheurs du Georgetown Lombardi Comprehensive Cancer Center (États-Unis) a réévalué l’impact des messages sanitaires sur les paquets de cigarettes. Les conclusions de ces travaux sont publiées dans la revue Tobacco Control.
Elles révèlent que les graphiques sanitaires jouent un rôle central dans la lutte contre le tabagisme et constituent un outil efficace dans la panoplie de mesures destinées à réduire la prévalence du tabagisme. Actuellement, plus de 70 pays à travers le monde ont adopté la Convention Cadre de l’OMS pour la lutte anti-tabac, ou sont en passe de le faire. Cette convention prévoit notamment l’inscription de messages et d’images sanitaires sur les faces avant et arrière des conditionnements de cigarettes.
145 000 naissances prématurées
Les États-Unis ont signée la Convention mais ne l’ont jamais ratifiée. Outre-Atlantique, seule une petite inscription apparaît sur la face latérale du paquet dénué d’images choc. Des avertissements illustrés, graphiques, ont été imposés par la loi fédérale mais les poursuites judiciaires engagées par l’industrie du tabac ont freiné la mise en œuvre.
Pourtant, selon les travaux des chercheurs américains, ces images sur les paquets de cigarettes permettraient d’éviter dans les cinquante prochaines années 652 000 morts, 92 000 naissances d’enfants de petits poids, 145 000 naissances prématurées et environ 1000 cas de morts subites du nourrisson aux États-Unis.
Pour parvenir à cette conclusion, les auteurs ont eu recours à une méthode baptisée SimSmoke, utilisée dans une vingtaine de pays pour évaluer les effets des politiques de lutte contre le tabagisme antérieures et futures. Les chercheurs ont notamment observé l’impact des « avertissements illustrés manifestes » sur les taux de tabagisme en Australie, au Canada et au Royaume-Uni.
Efficacité selon les pays ?
Ainsi, huit ans après la mise en place de ces images au Canada, les chercheurs ont observé une diminution de 12 % de la prévalence du tabagisme. Après leur introduction en 2006 en Australie, la prévalence du tabagisme a chuté de 21 % en 2007 à 19 % en 2008. Au Royaume-Uni, la mesure est entrée en vigueur en 2008 ; la prévalence a chuté de 10 % l’année d’après.
On peut toutefois objecter qu’en France, la prévalence n’a pas diminué de manière significative après l’instauration des messages sanitaires illustrés, en avril 2011. Si l’OMS considère cette mesure efficace et la recommande vivement, l’agence française Santé Publique France rappelle sur son site que malgré une efficacité observée outre-Atlantique, « des études récentes ont montré que l’effet du contexte national sur l’efficacité de telles mesures était particulièrement important ».
Il n’empêche. Aux États-Unis, les messages sanitaires illustrés permettraient de réduire de 5 % la prévalence du tabagisme à court terme et de 10 % à long terme, selon les chercheurs. L’instauration de ces avertissements illustrés serait d’autant plus logique que les États-Unis font office de pionniers en la matière : ils ont été les premiers à inscrire une mention sanitaire scripturale sur les paquets de cigarettes, en 1965. Selon l’OMS, les « avertissements illustrés manifestes » renforcent l’incitation au sevrage chez les adultes fumeurs et limitent l’entrée des enfants dans le tabagisme.
Source : pourquoidocteur.fr/