Les effets sur la santé à long terme de e-cigarettes restent encore largement inconnus, mais ces toxicologues de l’Université de Caroline du Nord montre que leur utilisation n’est pas anodine pour les gènes impliqués dans la défense immunitaire des voies respiratoires supérieures. Lorsque nous fumons des cigarettes, des dizaines de gènes impliqués dans la défense immunitaire sont altérés dans les cellules épithéliales qui tapissent les voies respiratoires. L’utilisation de la cigarette électronique aurait globalement les mêmes effets. Des conclusions à paraître dans l’American Journal of Physiology qui associent ces modifications épigénétiques à un risque probablement accru d’infections et d’inflammation.
Dans un communiqué de l’Université, l’auteur principal, le Dr Ilona Jaspers, professeur de pédiatrie et de microbiologie et d’immunologie se dit elle-même surprise par ces résultats. La recherche suggère précisément que l’inhalation des liquides vaporisés via les e-cigarettes ne sont pas sans effets sur le niveau d’expression génique des cellules épithéliales. Cette inhalation entraînerait des modifications épigénétiques, c’est-à-dire d’expression des gènes et donc de production de protéines importantes pour la santé de nos cellules.
Visuellement et fonctionnellement, les couches épithéliales de nos voies nasales sont très semblables aux couches épithéliales de nos poumons. Toutes les cellules épithéliales le long de nos voies respiratoires de notre nez aux petites bronchioles de nos poumons doivent fonctionner correctement pour piéger et éliminer les particules et les agents pathogènes et réduire ainsi le risque d’infection et d’inflammation. Ces cellules épithéliales sont donc essentielles pour une défense immunitaire normale. Certains gènes dans ces cellules doivent coder pour des quantités adéquates de protéines, qui orchestrent la réponse immunitaire globale. On sait depuis longtemps que la cigarette modifie l’expression de ces gènes, ce qui contribue à expliquer que les fumeurs soient plus vulnérables aux troubles des voies respiratoires supérieures.
Pour tenter d’évaluer les effets de la cigarette électronique sur les gènes impliqués dans la protection de nos voies respiratoires supérieures, l’équipe a analysé des échantillons de sang et d’urine de 13 non-fumeurs, 14 fumeurs et 12 utilisateurs de e-cigarette, afin de préciser les niveaux de nicotine. Chaque participant tenait également un journal documentant sa consommation de cigarettes ou son utilisation de e-cigarette. Au bout de 3 semaines, les chercheurs ont effectué des prélèvements dans les voies nasales des participants pour analyser l’expression de gènes importants pour la réponse immunitaire. L’équipe constate ainsi que,
- la cigarette réduit l’expression de 53 gènes importants pour la réponse immunitaire des cellules épithéliales,
- l’e-cigarette réduit l’expression de 358 gènes importants pour la défense immunitaire, dont les 53 gènes impliqués dans le groupe de fumeurs.
Les chercheurs écrivent avoir comparé ces gènes un par un et constaté que chaque gène commun aux deux groupes est plus « étouffé » encore dans le groupe e-cigarette. Cependant, à ce stade, ils ne concluent pas sur la sévérité des effets des deux pratiques.
A ce stade, il s’agit d’observations moléculaires qui n’ont pas encore été corrélées à des effets sur la santé à long terme de l’utilisation des e-cigarettes ou à des augmentations de risque de certaines maladies -comme cela a déjà été démontré avec le tabac (cancer, emphysème, maladie pulmonaire obstructive chronique…). Les chercheurs reconnaissent ne pas avoir encore identifié ces effets de long terme mais font l’hypothèse qu’ils seront « différents des effets de la cigarette ». La question reste celle des effets à long terme, les maladies comme la BPCO, le cancer ou l’emphysème prenant des années à se développer chez les fumeurs. D’autres recherches sont prévues sur les cellules épithéliales des utilisateurs e-cigarette…
Sources : – American Journal of Physiology (In Press) et UNC Health Care June 20, 2016 (E-cigarette use can alter hundreds of genes involved in airway immune defense)
– Santelog.com